L'empreinte carbone du numérique français est en pleine croissance
En août 2020, à la demande du ministère de la Transition écologique et le ministère de l'Économie, des Finances et de la Relance, l’ADEME et l’Arcep ont mené une mission commune de 18 mois, visant à mesurer l’empreinte environnementale numérique en France et à identifier des leviers d’actions et de bonnes pratiques pour la réduire. « S’il est souvent perçu comme positif, car créateur de croissance et de nouveaux modèles économiques, le numérique est pourtant responsable de 2,5 % de l’empreinte carbone de la France, et en forte croissance », rapporte l'étude. Ce chiffre pourrait sembler insignifiant.
Mais les auteurs de l'étude ont fait remarquer qu'il ne cesse d’augmenter. En outre, ils précisent qu'il n’y a aucun autre secteur où l’empreinte carbone augmente aussi rapidement, ce qui témoigne d’une dynamique très inquiétante. L'étude consistait à : qualifier l’empreinte environnementale actuelle des réseaux fixes et mobiles, avec des projections en 2030 et 2050 ; quantifier l’empreinte environnementale du numérique sur l’ensemble du système (équipements, réseaux, centres de données) et en prenant en compte les usages des particuliers et des entreprises ; et à définir des leviers d’actions et de bonnes pratiques pour réduire cette empreinte.
L'ADEME et l’Arcep ont remis le premier rapport de leur étude au gouvernement le mercredi 19 janvier, et voici les principales conclusions de l'étude :
- le numérique est responsable de 2,5 % de l’empreinte carbone de la France ;
- des trois composantes du numérique qui constituent le périmètre de l’étude, ce sont les terminaux (et en particulier les écrans et téléviseurs) qui sont à l’origine de 65 à 90 % de l’impact environnemental, suivis par les centres de données (entre 4 et 22 %) et les réseaux (entre 2 et 14 %) ;
- parmi tous les impacts environnementaux, l’épuisement des ressources énergétiques fossiles, l’empreinte carbone, les radiations ionisantes, liés à la consommation énergétique, ainsi que l’épuisement des ressources abiotiques (minéraux et métaux) ressortent comme des impacts prédominants du numérique ;
- de toutes les étapes du cycle de vie des biens et services considérées, la phase de fabrication est la principale source d’impact, suivi de la phase d’utilisation, concentrant souvent à elle deux jusqu’à 100 % de l’impact environnemental.
Détails de l’impact environnemental des services numériques
Afin de fournir une analyse complète des causes d’impact environnemental du numérique, l’ADEME et l’Arcep ont étudié chaque segment des services numériques indépendamment : les terminaux utilisateur, les réseaux et les centres de données.
Segment 1 : les terminaux utilisateurs
Les terminaux utilisateur représentent une large variété d’équipements, avec des impacts environnementaux et des quantités variées. Globalement, les téléviseurs sont les principaux responsables des impacts (entre 11 et 30 %), notamment en raison du nombre important de matériaux et d’équipements nécessaires à leur fabrication. Ensuite, les autres appareils présentant un impact environnemental significatif (entre 5 et 15 %) sont les suivants :
- ordinateurs portables ;
- tablettes ;
- smartphones ;
- ordinateurs fixes ;
- box TV ;
- consoles de jeux vidéo de salon ;
- imprimantes ;
- autres écrans.
Segment 2 : les réseaux
Selon l'Arcep et l'ADEME, les réseaux peuvent être divisés entre réseaux fixes (xDSL, FFTx), et réseaux mobiles (2G, 3G, 4G, 5G). Bien que la séparation entre les deux types de réseaux ne soit pas totale (certains équipements sont communs), il est possible de distinguer les impacts des deux types de réseau individuellement.
À l’échelle de la France, les réseaux fixes génèrent plus d’impact que les réseaux mobiles (entre 75 et 90 %, contre entre 10 et 25 %). En effet, les réseaux fixes consomment plus d’électricité en phase d’utilisation, et requièrent plus d’équipements, notamment du fait des box installées chez les utilisateurs. Mais, rapporté à la quantité de Go consommée sur chaque réseau, l’impact environnemental des réseaux fixes devient inférieur à celui des réseaux mobiles.
Par gigaoctet consommé, les réseaux mobiles ont près de trois fois plus d’impact que les réseaux fixes pour l’ensemble des indicateurs environnementaux étudiés. Néanmoins il s’agit d’une allocation comptable de l’impact par Go à but illustratif qui ne vaut pas pour comparaison de l’efficacité des réseaux fixes et mobiles.
Segment 3 : les centres de données
Les centres de données sont divisés en différents types : public local, public national, entreprises, colocation et HPC (High performance computing). Les types de centres de données ayant les impacts environnementaux les plus importants sont :
- les centres de données de colocation (entre 35 et 50 % des impacts) ;
- les centres de données d'entreprises (entre 30 et 45 % des impacts) ;
- les centres de données publiques nationales et locales (entre 5 et 15 % des impacts) ;
- les centres de données destinés au HPC (entre 0,1 et 5 % des impacts).
Les impacts environnementaux sont principalement dus au nombre de mètres carrés de salle informatique, au nombre de serveurs, de stockage, ou encore à la consommation électrique. En analysant plus en détail les équipements constituant un centre de données, ce sont les serveurs en particulier et le stockage dans une moindre mesure qui génèrent le plus d’impacts.
Sources : L'Arcep, Le rapport de l'étude (PDF)
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