Valorisé actuellement à plus de 47 ;000 dollars, le bitcoin est de loin la monnaie cryptographique la plus chère au monde. Les adopteurs précoces qui ont flairé depuis longtemps le potentiel de cette monnaie se frottent les mains aujourd’hui et espèrent une progression exponentielle du cours de cette monnaie. Cette situation qui n’a pas laissé indifférentes de nombreuses personnes et institutions a attiré de nouveaux investisseurs qui ont fait le grand saut dans l’aventure bitcoin. Mais le revers de la médaille est que le succès de cette monnaie ne se fait pas sans conséquence sur l’environnement. Il y a quelques moins d’un mois, l’université de Cambridge annonçait que le bitcoin consomme plus d’énergie électrique par an que l’Argentine tout entière. Si cela n’est pas suffisant pour soulever les inquiétudes concernant les monnaies cryptographiques en général et le bitcoin en particulier, une nouvelle analyse d’économistes de la banque centrale néerlandaise et du MIT révèle qu’une seule transaction du bitcoin génère la même quantité de déchets électroniques que jeter deux iPhone 12 à la poubelle.
Le problème de consommation d’énergie par le réseau Bitcoin : une affaire qui date de longtemps
Depuis plusieurs années, les acteurs de l’environnement n’ont de cesse de tirer la sonnette d’alarme sur les désastres écologiques que pourraient occasionner le réseau bitcoin et ses monnaies dérivées. Déjà en 2016, une étude avançait que le réseau Bitcoin étant très énergivore, il pourrait consommer autant d’énergie que le Danemark d’ici 2020. Nous sommes en 2021 et la consommation actuelle d’énergie du Bitcoin par an excède largement celle du Danemark. En 2018, une étude publiée dans la revue Nature Climate Change et menée par un étudiant de l’université d’Hawaï à Manoa a conclu que si le bitcoin est adopté à un niveau similaire à celui des autres technologies comme les cartes de crédit, il pourrait favoriser une augmentation de la température mondiale de 2 °C en moins de deux décennies. Sachant qu’un rapport des Nations Unies sur les changements climatiques a révélé qu’une augmentation de la température de plus de 1,5 °C aurait des effets climatiques irréversibles et catastrophiques, nous avons une idée du danger que la planète court si rien n’est fait. Plus récemment au mois de mars dernier, ce fut au tour du chercheur néerlandais Alex de Vries, fondateur de Digiconomist, d’annoncer sur la base d’un rapport reçu que la consommation d’énergie du bitcoin pourrait être proche de la consommation collective de tous les centres de données du monde réunis, et pourrait avoir des implications importantes pour l’environnement et la politique mondiale.
Comment en est-on arrivé là ;?
Pour mieux comprendre pourquoi cette monnaie et son réseau qui la soutient sont décrits comme peu respectueux de l’environnement, il faut savoir que pour valider les transactions de la chaîne des blocs du Bitcoin, cette monnaie cryptographique doit être minée, c’est-à-dire qu’il faut utiliser les ressources matérielles et énergétiques pour effectuer des calculs mathématiques complexes afin de valider les transactions de la chaîne des blocs. Dans ses débuts, l’extraction de bitcoins s’effectuait à l’aide des unités centrales de traitement (CPU) des ordinateurs. À la fin de la première année de Bitcoin (2009), on s’est rendu compte que le minage pouvait également être effectué à l’aide d’unités de traitement graphique (GPU). Il faut noter que les GPU extraient le bitcoin plus rapidement que les CPU. Vers 2011, les mineurs ont commencé à passer aux réseaux de portes programmables (FPGA). Et en 2013, les mineurs ont commencé à utiliser des circuits intégrés spécifiques à une application (ASIC) pour extraire les bitcoins. Comme son nom l’indique, les puces ASIC sont câblées pour effectuer un seul type de calcul (contrairement aux FPGA qui peuvent être reprogrammés pour d’autres types d’applications). Cela garantit que toutes les ressources sont optimisées pour la tâche de génération de hachages.
En plus de consommer de grandes quantités d’énergie pour générer de nouveaux blocs dans la chaîne des blocs, cette activité de minage a également pour effet de produire de la chaleur. À grande échelle et à long terme, cela a des conséquences énormes sur l’environnement. Mais il n’y a pas que ce problème d’énergie que l’extraction du bitcoin occasionne.
Bitcoin, ça pompe de de l'énergie, mais pas que ça…
Selon l’analyse effectuée par les chercheurs Alex de Vries et Christian Stoll qui ont publié le récent rapport, le minage du bitcoin contribue également à générer une quantité énorme de déchets électroniques (abrégé e-waste en anglais). Pour être plus explicites, les chercheurs avancent qu’étant donné que les puces ASIC sont vendues dans le seul but de confirmer les transactions et de les consigner dans le registre des blocs, les mineurs doivent constamment remplacer leurs matériels lorsqu’un nouveau modèle plus économe en énergie et plus performant est disponible. Cette situation fait que « ;la durée de vie des dispositifs d’extraction de bitcoins reste limitée à seulement 1,29 an ;», soulignent les chercheurs. Et vu qu’en 2020, le réseau Bitcoin a traité 112,5 millions de transactions (contre 539 milliards traitées par les prestataires de services de paiement traditionnels en 2019), cela signifie pour les chercheurs « ;qu’en moyenne, Bitcoin génère 272 g de déchets électroniques par transaction traitée sur la blockchain ;», ce qui correspond au poids de deux iPhone 12 mini. En s’appuyant sur ces chiffres, les chercheurs « ;estiment que l’ensemble du réseau bitcoin parcourt actuellement 30,7 kilotonnes d’équipements par an. Ce nombre est comparable à la quantité de petits déchets d’équipements informatiques et de télécommunications produits par un pays comme les Pays-Bas ;», ajoutent les chercheurs. En sus, les chercheurs soutiennent que le problème des déchets électroniques augmentera probablement encore si le prix du bitcoin continue d’augmenter, car cela incitera à investir davantage dans le matériel ASIC et à remplacer.
Quelles solutions pour régler le problème des déchets électroniques ;?
Pour régler ce problème de déchets électroniques et par la même occasion de consommation énergétique des monnaies cryptographiques en général et du bitcoin en particulier, les chercheurs proposent de remplacer le processus d’extraction du bitcoin dans « ;son intégralité par une alternative plus durable ;». À ce niveau, certaines alternatives ont commencé à faire surface. Ethereum, le deuxième plus grand réseau après le Bitcoin envisage de passer du modèle de preuve de travail pour valider les transactions sur sa blockchain au modèle de preuve d’enjeu. En théorie, cela pourrait résoudre un tant soit peu ces problèmes susmentionnés en espérant que d’autres problèmes imprévus ne surgiront pas. Mais pour l’instant, rien n’est encore fait. Chia, une plus récente monnaie cryptographique a opté pour une autre solution qui est la preuve de temps et d’espace. En gros, cette cryptomonnaie fonde son minage sur la quantité d’espace de stockage libre disponible sur la mémoire SSD ou le disque dur. Avec cette option, à terme, on pourrait se retrouver à la case départ avec un grand nombre de disques durs ou SSD en panne à cause de leur surexploitation.
Source : Rapport de l’étude
Et vous ?
Que pensez-vous du problème de déchets électroniques soulevés dans ce rapport ;? Réel ou grossièrement alarmiste ;?
Selon vous, quelles solutions pourraient régler les problèmes occasionnés par le bitcoin ;?
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Le , par Olivier Famien
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